Quand j’étais petite, j’avais de l’aplomb.
Je n’avais peur de rien. J’osais tout. J’ai fait des tas de bêtises, et je suis assez fière de certaines d’entre elles 🙂
Comme d’avoir écrit une lettre anonyme à mon instituteur avec l’aide de mes amis Olivier, Thibaut et Nicolas, menaçant de séquestrer sa femme et sa fille s’il nous obligeait à participer à la danse tyrolienne à la Saint-Nicolas. Honteux.
Ou bien encore, d’avoir créé une société alternative avec la même bande, avec tout une structure hiérarchique (nous devions être au sommet de la pyramide, je présume), de faux bancontacts en caisses de carton, des faux billets que nous imprimions avec la fameuse machine Fisher Price, dont les lettres en caoutchouc prenaient des plombes à être glissées sur le cylindre à manivelle. Notre société s ’appelait « Belgipunk ». Nous avons dû tout arrêter et avons été punis d’avoir été trop subversifs. Je devais avoir 8 ou 9 ans.
J’adorais jouer, créer, dessiner, me déguiser. Avec Joanne, la grande sœur de Thibaut, nous portions les longues robes hippies et les breloques de nos mères. Et nous jouions à être des princesses rebelles, et des servantes encore plus rebelles. Rebelle au point de me percer moi-même les oreilles avec une punaise désinfectée au briquet.
Je n’avais peur de rien, non. Je ne connaissais ni la honte, ni la peur de déplaire.
A la fin des primaires, j’ai été happée par les injonctions de réussite de l’école. Notre instituteur, à l’ancienne, cache-poussière gris, nous collait de bonnes et mauvaises lignes, avec des récompenses et punitions à la clé. Et frotteurs volants (merci Marie G., pour le rappel). Mademoiselle Bertrand apprenait aux filles le point de croix et les ourlets. Nous devions terminer le plus vite possible notre cahier de 1001 exercices de maths. Matheux ou pas. J’étais trop contente que mon joli cahier tout propre soit montré en exemple à toute la classe. Bref, de la comparaison, de la compétition, des injonctions de perfection. Des complexes naissants. Un joli terreau pour la honte. Un début de timidité.
Passage aux secondaires. Collège catholique. Mes parents artistes évoquent régulièrement leurs difficultés financières et je commence à intégrer que l’art ne permet pas de vivre décemment. Il m’est tout de même proposé de faire du piano et de la danse classique (en plus du scoutisme, dans une unité huppée), ce qui cadre parfaitement avec une certaine représentation de la bonne éducation au sein d’une certaine classe sociale, du côté de ma mère. Impossible de persévérer, et mon corps n’est pas du tout fait pour la danse classique. Des articulations épaisses, un coup de pied raide, aucune souplesse. Honte encore, face aux corps gracieux et à la fluidité de mouvement de certaines de mes comparses.
A 13 ans, lunettes en cul de bouteille et appareil dentaire, le combo gagnant pour avoir confiance en soi. Des super notes et une rigidité de plus en plus encombrante. Et de plus en plus de honte, qui se mue progressivement en agoraphie et en peur de rougir.
… La suite au prochain épisode 😉
> tranches de vie 2/2
A bientôt, ici ou ailleurs !